né en 1968 à Rékong, Tibet oriental, Palden Gyal vivait en exil à Londres lorsqu'il écrivit de poème, engagé à la façon tibétaine, où il déplore de ne pouvoir retourner au pays de ses ancêtres, dont il se languit. Avril 1995
Un chant d'exil
Un de mes bons amis d'Amérique
Est parti un jour pour le Pays des Neiges.
Il a bu là-bas l'eau fraîche des glaciers
et m'a rapporté de la farine d'orge.
Chaque fois que je porte cette tsampa à ma bouche,
Je me souviens des champs de ma terre natale.
Une de mes amies de France, aux cheveux blonds,
S'est mise en route un jour pour le Toit du Monde.
Devant Tisé le blanche montagne elle a posé son front
Et m'a rapporté le fromage sec de ces alpages.
Chaque fois que je le porte à ma bouche
Je me souviens des troupeaux de yaks et de dris.
Un de mes amis d'Angleterre, très sensible,
S'est mis en quête du mystère des montagnes enneigées.
Il a rencontré mes vieux parents
Et m'a rapporté leurs mots affectueux.
Quand j'écoute ces douces paroles,
Je me souviens de la bonté de mon père et de ma mère.
Une amie danoise à la vive intelligence
S'est intéressée à l'âme véritable du Pays des Neiges.
Elle a rencontré des jeunes gens là-bas
Puis a rapporté des vérités secrètes.
Chaque fois que j'entends ces propos d'initiés
Mon coeur se souvient de ma jeunesse au Tibet.
Mes amis voyagent à leur guise dans le Haut Pays.
Et moi qui suis né au Tibet
N'ai aucune chance, hélas, d'y aller.
A chaque battement de mon sang et en mon souffle même,
Je me languis de la terre de mes ancêtres.
Comment les exilés, ceux qui sont nés au Tibet,
Retourneraient-ils au Pays des Neiges ?
Et comment offrir l'écharpe blanche,
L'allégresse et la sincérité de mon coeur ?
Et comment prononcer le voeu sacré du diamant
Au pays des neiges éternelles ?